Murs - Murs For President
Depuis sa première victoire aux élections en 1997, Murs s’est toujours tenu à un programme de qualité, donnant de sa personne sans compter. Arrivera-t-il au bout du mandat de ce nouvel opus dans le même état d’esprit et avec la même côte de popularité que son entame tonitruante le laissait espérer ?
1. Intro
2. I’m Innocent
3. Lookin’ Fly (feat. Will.i.am)
4. The Science
5. Can It Be (Half a Million Dollars and 18 Months Later)
6. Everything
7. Road Is My Religion
8. Sooo Comfortable
9. Time Is Now (feat. Snoop Dogg)
10. Think You Know Me
11. Me And This Jawn
12. Love And Appreciate II (feat. Tyler Woods)
13. A Part Of Me
14. Break Up (The OJ Song)
15. Breakthrough
Murs For President, c’est un peu comme si les Bisounours avaient engagé l’ourson de Kanye West comme air-guitariste de luxe et signé chez Def Jux (label sur lequel Murs avait sorti deux albums en 2003 et 2004). C’est Obama allongé dans un champ à mâchonner des coquelicots avec un sourire béat. C’est la conquête de l’amour et sa préservation au jour le jour vues comme un programme politique en 14 chansons. C’est le rappeur le plus cool de la côte ouest (et détenteur de la coupe de tifs la plus extravagante soit dit en passant) qui refait le monde entre deux taffes en petit comité (Snoop Dogg parfait sur l’élégant et jazzy Time Is Now agrémenté de choeurs gospel, Will.i.am heureusement parcimonieux sur l’extraverti Lookin’ Fly avec son sample presque cartoon du Theme From Green Hornet d’Al Hirt déjà entendu sur la BO de Kill Bill ).
Empruntant à la pop comme à l’abstract et au jazz (The Science, produit par Scoop DeVille, qui signe deux des instrus les plus impressionnants de l’album en enchaînant avec l’épique single Can It Be), au dubstep (le psychédélique Soo Comfortable qui porte son nom comme un bonnet rasta) ou surtout à la soul (sur une majeure partie des morceaux) en passant par le r’n’b (un peu trop souvent il faut bien l’avouer) et même le hard rock (Road Is My Religion), les mises en son des différents producteurs de l’album, pas moins de dix au générique dont la plupart sont peu connus chez nous et loin d’être aussi bons ailleurs qu’ici, portent tous la marque immédiatement identifiable de Murs, celle d’un hip-hop "ligne claire" qui ne passe pas par quatre chemins à la fois sans avoir pour autant l’habitude des autoroutes trop balisées.
Une ambition de quintessence hip/pop atteinte par une grosse première moitié d’album tout à fait capable de soutenir la comparaison avec le Kanye West des débuts (cf. l’extraordinaire Everything avec un certain LT Moe aux manettes et dont le sample miraculeusement magnifié de James Blunt parviendrait presque à faire passer l’agaçante Castafiolle anglaise pour un magicien de la pop fervente et fiévreuse façon Damien Rice) mais qui hélas ne tient pas en lévitation aussi longtemps qu’on l’aurait souhaité et s’écroule d’un coup d’un seul avec le pataud Think You Know Me puis un Me And This Jawn aventureux mais gâché par une rythmique décalée affreusement poussive, pour tomber ensuite dans la routine et la facilité. Un déséquilibre de construction quelque peu étonnant que 9th Wonder tentera de rattraper par la suite le temps d’un Love and Appreciate II vibrant et soulful (le numéro I figurait sur Murray’s Revenge en 2006), tandis que le très pop-rock A Part Of Me limite la casse grâce à ses rimes touchantes et à un refrain accrocheur bien qu’un peu trop radio friendly pour être totalement honnête et toujours à un cheveu de basculer la tête la première dans le mainstream.
Pour des "hauts" moins hauts mais aussi moins de "bas", on pourra toujours se reporter sur la troisième collaboration entre Murs et 9th Wonder, l’euphorisant et trop court Sweet Lord lâché gracieusement sur le net cet été. Les instrus soul du second siéent décidément bien à la coolitude béate - parfois en apparence seulement - du premier, mais c’est tout de même sur Murs For President que la paire aura signé son meilleur morceau de l’année avec le lyrique I’m Innocent, construit sur le genre de boucles soul lyriques chères au producteur Nord-Carolinien qui pourraient lasser sur la durée comme c’est parfois le cas sur ses albums avec Buckshot notamment (au demeurant plutôt réussis à l’image de The Formula paru en avril dernier) si le flow généreux de Murs n’était pas là pour en transcender chaque seconde. La métaphore rêvée d’une relation amoureuse achevée ?
Can It Be et cinq autres extraits de l’album sont à découvrir sur la page myspace de Murs.
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