Ssaphia - Buried in Sphaxx

1. To Die For
2. Siroc Ashes
3. Lost in the Souq
4. A Heart Bleeds in the Sand
5. Once There Was Life
6. Walking in Chains
7. Buried in Sphaxx

2024 - Musique moléculaire label

Sortie le : 7 octobre 2024

Déterrer les tragédies du passé

À ce rythme on va bientôt nous dire qu’il n’y en a que pour Musique Moléculaire en ce moment dans les pages d’IRM, mais aucun pot de vin ni avantage en nature, promis ! Après l’enthousiasme immédiat que suscita The End and Beginning of​.​.​. dans nos colonnes il y a 5 mois, il nous était tout bonnement impossible de faire l’impasse sur Buried in Sphaxx, qui vient déjà confirmer, et même davantage encore, tout le bien que l’on pensait de ce mystérieux projet dont on ne sait à vrai dire absolument rien si ce n’est que la musicienne - ou le musicien ? -, qu’il s’agisse de l’alias d’un habitué du label ou d’un nouveau-venu timidement sorti du néant des internets (pas la moindre page sociale au nom de Ssaphia ni compte sur Bandcamp ou Soundcloud, ce qui est suffisamment rare pour être signalé), semble avoir pris pour habitude de baser ses albums sur des samples de vieux films français.

Plus étoffé que son prédécesseur (et plus long de dix minutes), Buried in Sphaxx privilégie à nouveau les instrumentaux emboîtés à la manière d’une véritable construction narrative, incitant ainsi au téléchargement pour de meilleures conditions d’écoute. Cultivant une fois de plus un dark ambient élégiaque et fantomatique aux sonorités lo-fi assumées, à la fois très immersif et profondément évocateur par un savant mélange de boucles hypnotiques et de crescendos insidieux (A Heart Bleeds in the Sand en étant probablement la plus belle illustration), d’austérité du son et d’ambition du récit, ce deuxième opus inspiré cette fois d’un long-métrage dont l’histoire se déroule en Tunisie - et que l’on pense avoir reconnu mais sans certitude donc on ne vous dira rien - s’avère néanmoins plus mystique, plus nostalgique aussi que The End and Beginning of​.​.​. dans cette fatalité chère à Ssaphia, les souvenirs de jours meilleurs semblant ainsi remonter à la surface sous les nappes sépulcrales d’un morceau tel que Once There Was Life, au titre explicite, sous la forme de motifs loopés de chant, flûte et percussions laissant imaginer quelque scène de danse de rue noyée dans la mémoire d’un mystérieux protagoniste.

Dès l’intro To Die For (dont le sample de voix féminine donne le ton de désespoir hanté : "une fois y a longtemps j’ai dit la vérité à un homme... et tu vois où j’en suis, j’en crève"), l’album se révèle également plus riche en détails et en arrangements (les saturations scintillantes et autres choeurs de sirènes inquiétants de Siroc Ashes, les idiophones, cloches et motifs de guitare psyché de Lost in the Souq), plus dense dans ses nappes d’harmonies malaisantes (Walking in Chains et ses allures de Ligeti du caveau réinventé par Ennio Morricone), autant d’éléments qui lui confèrent une véritable aura de bande originale imaginaire, sans pour autant nuire à cette dimension organique, habitée qui se perd malheureusement dans le genre à mesure qu’il sort des catacombes pour se retrouver sur des labels plus grand public adeptes des productions chiadées. Un très gros coup de coeur en somme, conseillé à tous les amateurs du genre.


( RabbitInYourHeadlights )


Disques - 07.10.2024 par RabbitInYourHeadlights