Après avoir goûté sans jamais vraiment les mettre en avant faute de temps le classical ambient onirique de la Vietnamienne et ses travaux plus dronesques et abstraits sous le pseudonyme Sound Awakener, Monochrome est enfin occasion d’offrir quelques lignes bien méritées à la pianiste et sculpteure d’atmosphères Nhung Nguyen, qui s’est inspirée sur cet EP sorti chez Elm Records de quatre photographies en noir et blanc pour imaginer les tonalités minimalistes et lancinantes d’autant d’instrumentaux aux harmonies troublées.

Après le rêveur Little Things aux accents bucoliques enregistré à quatre mains avec le Grec Dalot et publié en tout début d’année par Fluid Audio, Monochrome marque un repli sur soi entre mélancolie et opacité. Pas de piano ici, pas même sous forme de résidus déstructurées ou de boucles manipulées. Sur le morceau-titre de 10 minutes, des synthés lyriques et field recordings du ressac sont régulièrement engloutis par des fréquences volontairement perturbantes, offrant à l’auditeur de précieux moments de sérénité lorsqu’elles se retirent telles la marée.

Tout aussi maritime mais vertigineux et glacé comme un vortex qui vous aspire vers les grands fonds, One Frame At A Time est un sommet de fausse quiétude anxiogène tandis que Silent Dream avec ses cascades de cliquetis naturels et de nappes radiantes semble nous extirper de cette masse organique pour nous élever vers la stratosphère dans un halo solaire. Enfin, In the Garden a l’étrange qualité pastorale des rêves d’Eden qu’un réveil imminent menace d’effondrement, une pureté sur le fil d’un séisme du subconscient qui sert de parfaite conclusion à la plus belle sortie de la musicienne à ce jour.