Le streaming du jour #1699 : Carbon Based Lifeforms - ’Derelicts’
Il s’agit désormais d’un fait acquis, en matière d’IDM stellaire, Carbon Based Lifeforms fait partie de figure incontournable. Régulièrement cités comme référence dans nos colonnes, au même titre que LPF12 ou même Jérôme Chassagnard, les Suédois profitent de cette année 2017 pour livrer un nouveau disque qui s’était fait attendre.
En effet, Derelicts est le successeur d’un Twentythree composé il y a déjà six ans. Certes, le duo avait entre-temps partagé la courte bande originale de Refuge, le live ALT :01 et deux albums de remixes, mais aucune sortie à appréhender comme un nouveau long-format.
Avec Derelicts, Carbon Based Lifeforms maintient des niveaux d’inspiration et d’exigence particulièrement hauts. Cohérent au possible sans jamais être redondant si l’on se donne la peine d’accorder une écoute sérieuse à ces douze compositions immersives, ce septième LP du duo de Göteborg constitue un casse-tête pour le chroniqueur qui souhaite éviter tous les poncifs inhérents à l’exercice de ce genre.
Résolument astrales, les productions de Carbon Based Lifeforms évoluent toujours entre une ambient contemplative (Clouds)
et une IDM futuriste, à l’image d’un Accede aux percussions entraînantes accompagnant une tonalité idéale pour illustrer une course dans l’espace. La science-fiction n’est donc jamais très loin.
Un certain apaisement émane de cette narration pleine de subtilité, et la voix féminine qui se veut rassurante d’un 42° ne tarde pas à précéder des glitchs et beats donwtempo métronomiques spatiaux et éthérés. Des éléments concis et aigus apportent par ailleurs autant d’ampleur que de candeur à un titre tel que Nattväsen sur lequel l’austérité apparaît petit à petit, à l’image du malaise se dégageant de ces spoken words enfantins qui se veulent rassurants mais desquels émanent une parentification prégnante. Comme si les esprits les plus purs devaient assurer la protection de ceux qui sont prétendument plus armés pour surmonter les différents obstacles.
Il est autant question de résilience que de survie sur cet album, et les éléments contraires ne tardent pas à apparaître, que ce soit sur l’ambient post-apocalyptique de Rayleigh Scatterers ou sur un 780 Days où les field recordings animaliers initiaux laissent rapidement place à une tonalité industrielle, comme un clin d’œil à la pochette de Derelicts.
Au milieu de ce voyage, Carbon Based Lifeforms (s’)offre deux odyssées majeures. Les neuf minutes d’un Equilibrium débutent par une ambient minimaliste pour s’étoffer petit à petit et, quand la réverbération et les rythmiques apparaissent, c’est le mélange d’un dub évoquant certains remixes de Massive Attack par Mad Professor et d’un big beat rappelant Crystal Method qui s’offre à l’auditeur.
Quant au Everwave de quatorze minutes qui vient clore cette sortie, il semble construit autour d’une même respiration. La nappe synthétique subit quelques variations et semble suivre un mouvement oscillatoire. Elle est pourtant soutenue ici et là par des granulations discrètes ou d’autres synthés en contrepoint qui offrent de la profondeur à ce titre domptant un mur du son cotonneux et permanent.
En somme, Daniel Segerstad et Johannes Hedberg ont pris leur temps pour concocter cet album. Il faut dire que, pour la première fois peut-être, ils étaient attendus par un public conséquent. Sur Derelicts, l’auditeur pourra apprécier à quel point le duo scandinave a pu influencer certaines sorties du prestigieux catalogue n5MD, Dreissk en tête.
Avec cette bande originale imaginaire d’un voyage stellaire, entre onirisme et dystopie, les Suédois ne décevront en tout cas pas leurs fidèles. Oeuvre dense basée sur un son ample offrant un panel d’émotions diversifiées sans jamais chercher à accentuer la dynamique ambiante, Derelicts ne pouvait leur permettre de mieux négocier le virage de la (relative) notoriété.
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