Le streaming du jour #1530 : Lifecutter - ’Death(c)rave’
Il faut être un brin masochiste pour pleinement apprécier la dernière livraison de Domen Učakar (Ontervjabbit, Neon Spektra) et ça tombe bien, le masochisme, c’est justement l’une des sources d’inspiration de ce second long format du Slovène sous cette identité dédiée à ses explorations asphyxiantes aux confins de l’électro indus, du harsh noise et du dark ambient.
Et d’asphyxie, il était justement question sur le premier extrait Asphyxia au clip dévoilé en avant-première dans nos pages en janvier dernier, un morceau encore plus oppressant et radical en vidéo et dont les 6 minutes de pulsations techno-indus larsenisantes plaçaient la barre très haut en terme d’agression sonique. Pourtant, force est de constater à l’écoute de Death(c)rave - référence au "masochisme primal" du todestrieb ou death drive en anglais, cette pulsion de mort étudiée par Freud et associée ici aux tentations autodestructrices d’une recherche du plaisir parfois plus malsaine que satisfaisante - que Lifecutter, en bon tortionnaire de tympans qu’il est depuis l’impressionnant Siclar de 2015, avait gardé au chaud ses shrapnels les plus meurtriers.
Ça démarre en effet pour le moins violemment avec la technoise implosive et sursaturée d’Hypoxia, rave azimutée sur une chaîne d’usinage détraquée entre deux breaks acides évoquant les plus radicales de ces bacchanales musicales de l’underground 90s dont les rescapés sont sûrement aujourd’hui sourds ou malentendants. Une partie de plaisir néanmoins au regard du Crushing Trauma qui s’ensuit, dont les martèlements power electronics charrient en un flot ininterrompu bourdons abrasifs et larsens tranchants. Il faudra bien la relative accalmie du grondant Loss of Consciousness pour soigner ses lésions à défaut de reprendre sa respiration, tant le dark ambient dense et crépitant de cette continuation du récent Safe Place parvient à évacuer tout l’oxygène environnant.
Entre deux Ligature harsh noise qui semblent taillader la chair jusqu’aux nerfs, provoquant ce genre de flashs de douleur incontrôlable qui vous font vous sentir vivant pour un instant et encore plus mal le moment d’après, la suite ne sera guère plus hospitalière, à moins qu’il ne s’agisse de nous envoyer à l’hosto justement, nécrosés de la tête aux pieds par le marteau-piqueur clouté, rouillé et chimiquement infectieux de l’impitoyable Amyl Nitrite, tandis que Todestriebe, profession de foi auto-punitive, convoque Autechre et Alec Empire sous les va-et-vient d’un rouleau-compresseur aux malaxages électro-indus plus suffocants que le plus extrême d’Imaginary Forces et de JK Flesh réunis. Un bonheur quoi - on se comprend.
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