Le streaming du jour #1304 : Lifecutter - ’Siclar’
Déjà aux manettes de feu Icarus Down et du projet électro-pop Neon Spektra, le Slovène Domen Učakar s’était tapageusement invité dans nos pages il y a deux ans au côté de son compatriote Neven M. Agalma (Dodecahedragraph, Cadlag) derrière les machines d’Ontervjabbit, duo harsh noise incandescent dont les abstractions futuristes et désincarnées culminaient sur les vortex analogiques du cauchemardé 414.
Une radicalité qui n’empêchait nullement la mélancolie de pointer sous les tempêtes cosmiques de bruit blanc et de grouillements électro distordus, tout comme un certain lyrisme (Membrane Twich) sous-tend aujourd’hui les crescendos techno-indus abrasifs et déliquescents de ce premier long format de Lifecutter aka Učakar en solo. Suite du joyau noir Aux Eardrum, premier EP sorti il y a tout juste un an et toujours librement téléchargeable via Bandcamp, Siclar en perpétue la sensation d’enfermement, de martèlements mathématiques ultra-minimalistes en dérèglements saturés de machines en révolte, mais surtout cette tension névrotique qui se combine aux radiations angoissées des drones au second plan (Dark Marrow) pour insuffler force urgence et schizophrénie (cf. l’acharné Medulla à la limite de l’implosion) dans cette rhythmic noise bien viciée et moins mécanique qu’il n’y paraît.
Les beats claquent sur l’acier en fusion au son des sirènes de sécurité (Siclar), cognent sans relâche sur l’enclume et relâchent leur gaz sous pression (l’épique Pulse Ventor). On pense à Pan Sonic, Alec Empire bien évidemment (Cortex et ses relents old school de digital hardcore), plus récemment Sturqen mais surtout à l’impressionnant The Power And The Glory de Perc pour cette capacité à déjouer les fondations répétitives d’un genre qui ne cesse ici de muter au gré des compositions mouvantes et hallucinées du Slovène.
Dépassant souvent les six minutes pour culminer sur les dix minutes finales d’une progression martiale et ténébreuse de toute beauté vouée à rejoindre les astres (Axon Memory Cycle), ces 9 titres s’avèrent même autrement plus viscéraux et flippants, en témoigne un Tremor dont les pulsations sans pitié résistent tant bien que mal aux assauts des distos de synthés menaçants, grésillements spectraux et autres reflux harsh corrosifs, œil du cyclone qui conduira à l’accalmie toute relative de l’algébrique Anvell, digne du meilleur de Mark Fell ou d’Alva Noto chez Raster-Noton en plus bruyant. Et le plus étonnant c’est qu’arrivé au bout de cette soixantaine de minutes éprouvantes, étouffantes, épuisantes, on ne peut qu’en redemander, contaminé par la fièvre des abysses que procure la contemplation de ce puits de noirceur sans fond.
Fracassant.
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