Interview sur un nuage - 5/ 7even Sun
Les plus fidèles de nos lecteurs auront certainement remarqué des messages subliminaux distillés ces dernières semaines sans ostentation dans nos pages, concernant un ambitieux projet prévu pour les fêtes de fin d’année. Coupons court au mystère, si ce n’est au suspense : il s’agit d’une compilation, entièrement composée de morceaux inédits que nous ont gracieusement offerts un certain nombre d’habitués des colonnes d’IRM. Et... c’est tout pour le moment ! Vous en saurez plus très bientôt en suivant les petits cailloux que la rédaction sèmera à raison de deux interviews par semaine, agrémentées d’énigmes et de surprises, jusqu’à la mise à disposition de l’objet. Une invitation à vous familiariser avec l’univers de nos contributeurs de tous horizons géographiques et musicaux, en espérant qu’ils vous surprennent et vous enthousiasment autant que nous.
De ses collaborations soulful et aériennes avec le rappeur new-yorkais Cans aux rêveries cool et moelleuses de son album Abscrete en passant par un diptyque d’EPs rétro-futuristes et funkysants ou d’autres encore sur lesquels on reviendra plus bas, on n’aura pas manqué une occasion de mettre en avant les instrus ligne claire de l’Aixois 7even Sun depuis un peu plus d’un an et demi, tant par passion pour son hip-hop en suspension mâtinée d’électro entre deux âges que par appréciation pour une générosité qui l’aura vu nous abreuver sans discontinuer de sorties en téléchargement libre, citons encore les beat tapes Digital Dust et surtout le récent EP Sun qui le voit peut-être bien parvenu au sommet de son art de l’épure groovesque et sensuelle... à moins qu’il ne vous faille attendre pour cela la sortie de notre compilation où figurera en bonne place un certain Indian Summer délicieusement vintage et ensoleillé. Entretien et bonus inédit pour patienter, quand on vous disait que le bonhomme avait le cœur au bout des doigts...
L’interview
IRM : Y a-t-il deux ou trois choses que nos lecteurs devraient savoir de toi avant d’écouter la compil’ ?
7even Sun : Pas forcément, mais pour me présenter brièvement je dirais que je suis un producteur de Hip-Hop, un beatmaker. Au départ je faisais des sons exclusivement pour MCs, essentiellement des Américains depuis 2007, mais j’en suis venu progressivement à aussi réaliser des projets entièrement instrumentaux depuis 2010.
Tu as un background très ancré dans le hip-hop du Golden Age teinté de soul et de jazz, quels sont les producteurs qui t’ont le plus influencé à tes débuts ou continuent de le faire ?
Oui c’est vrai que cette époque est de loin ma plus grande influence, c’est avec ce type de sons que j’ai découvert et aimé le Hip-Hop quand j’étais ado. Autant les productions soul/jazz de Pete Rock, DJ Premier, Jay Dee, ou RZA que les productions funky de Dr Dre, DJ Quik ou encore Erick Sermon pour ne citer que mes favoris. Mais bon j’ai commencé à produire sérieusement qu’à partir de 2003 donc entre-temps et pendant mes débuts il y a aussi des producteurs comme Just Blaze, Kanye West, 9th Wonder, Madlib, Kev Brown, MF Doom ou encore Timbaland qui m’ont mis quelques claques et m’ont donc forcement influencé aussi. Cela dit quand je fais un son j’essaie vraiment de créer mon propre truc, honnête et unique, j’ai toujours eu conscience que l’originalité était ce qui faisait en grande partie la qualité artistique d’une œuvre. Après de temps en temps, pour le plaisir, ça peut m’arriver de faire un son "hommage" qui reprend les codes de certains courants du Hip-Hop et du R&B de l’époque. Ça peut être du G-funk, de la New Jack, ou des sonorités plus new-yorkaises par exemple, mais toujours à ma sauce, en évitant de tomber dans le copier/coller.
Qu’est-ce qui t’a décidé à prendre part à ce projet ?
En fait Indie Rock Mag soutient ma musique depuis un bout de temps maintenant, avec un premier article sur mon LP instrumental Another Dimension l’année dernière, puis d’autres ont suivi au fur et à mesure que je sortais des projets, et j’en ai sortis beaucoup dernièrement. J’entretiens donc de très bonnes relations avec eux, enfin avec vous quoi ! Ahah... En plus étant amateur du Mag et connaissant vos goûts musicaux pointus et éclectiques j’étais sûr que le projet serait de qualité et mené sérieusement de bout en bout. Mais l’éclectisme est justement ce qui m’a le plus plu dans ce projet, c’est une opportunité de toucher des gens qui n’auraient jamais découvert ma musique autrement. Et vice-versa, des auditeurs attirés par la partie plus Hip-Hop par exemple, pourront découvrir des artistes d’autres styles musicaux. C’est bien, ça va à l’encontre de la classification systématique de la musique par genres, d’enfermer des artistes dans des cases bien définies, j’aime pas trop les barrières en général et encore moins en musique...
Si tu devais décrire ta contribution en une phrase ?
Planons ensemble au soleil couchant pendant l’été indien...
Tu manies aussi bien les samples rétro que des influences électro plus actuelles, comment imagines-tu tes morceaux et à partir de quels éléments trouvent-ils d’abord leur structure ?
C’est vrai, j’aime bien mélanger les deux. En fait je ne me fixe pas trop de limites, j’essaie d’utiliser toute la palette de possibilités que m’offre le peu de matos que j’ai et je ne procède jamais vraiment de la même façon. Cela dit, je commence presque toujours par rechercher du sample, ou plutôt de la matière sonore vu que j’utilise rarement un sample tel quel. Je modifie souvent ce que je sample de façon à ce que mes sources soient difficiles à identifier et surtout pour vraiment créer quelque chose de nouveau et d’original.
Des fois j’ai déjà un concept en tête avant de commencer, du coup je vais orienter mes recherches de samples et la construction du morceau en fonction. Mais le plus souvent je me laisse porter par mon humeur du moment et dès que je trouve quelque chose qui m’interpelle, ça peut être une mélodie, une atmosphère, un accord, ou encore une ligne de basse par exemple, alors le processus créatif part de là. Voila, après il y a toute la partie rythmique et tout ce qui est basé sur des synthés ou autres instruments VST. Je combine donc tout ça avec tout ce qui est basé sur du sample, et piste après piste, idée après idée, le morceau prend forme. Mais comme je disais ma façon de procéder est très variable, pour donner un exemple concret je peux très bien commencer par taper mes drums, puis jouer une basse au synthé, puis aller chercher du sample seulement à ce moment là. Sinon il y a des fois où il peut n’y avoir que du sample ou au contraire que de la "compo midi". En tout cas je joue de plus en plus de trucs "live" et quantifie de moins en moins avec le temps, surtout afin d’imprimer un vrai "groove perso" au truc. En fait j’essaie avant tout de ne pas me lasser et de faire en sorte que ce soit toujours divertissant, donc j’expérimente des nouvelles possibilités que je n’ai pas encore explorées aussi souvent que possible.
La musique "gratuite" ça t’inspire quoi ?
Ben j’ai l’impression que c’est devenu synonyme dans l’esprit de beaucoup de gens depuis qu’internet s’est démocratisé. En tant qu’artiste indé ça peut être désespérant parce que c’est devenu quasi impossible de vivre uniquement des ventes de disques/mp3s et très dur de vivre de son art tout court. Après en tant que consommateur de musique, je comprends qu’on puisse ne pas avoir les sous pour acheter tout ce qu’on aime, ou ne pas avoir de sous du tout, et qu’on veuille quand même écouter du bon son. Par contre la musique "gratuite" a le mérite de permettre à des artistes émergents comme moi de se faire connaître, c’est aussi un outil de promotion. Donc bon, tout ça m’inspire des sentiments mitigés... En tout cas on sent que l’industrie musicale est en période de transition et c’est très dur aujourd’hui de savoir de quoi demain sera fait...
Refreshment Session compile une quinzaine de collaborations avec des MCs d’outre-Atlantique et tu as également enregistré deux albums avec le rappeur new-yorkais Cans. Comment ont eu lieu ces rencontres ? Était-ce une sorte de "rêve américain" pour toi ?
En fait je me suis connecté avec tous ces artistes à la grande époque de myspace, entre 2007 et 2009, par internet donc. Ça s’est passé naturellement, j’aimais bien ce qu’ils faisaient, ils kiffaient bien mon son, donc on a essayé de "construire" ensemble.
"Rêve américain", oui dans le sens ou les States c’est quand même la référence ultime en Hip-Hop, et à l’époque, pouvoir travailler avec des artistes US c’était quand même un petit accomplissement pour un beatmaker non-américain. Je me souviens d’avoir vécu mes premières collaborations comme une espèce de reconnaissance par les créateurs du genre, c’est clair que ça m’a encouragé à persévérer en tout cas. Par contre j’ai pas encore eu l’occasion de partir là-bas et de rencontrer tout le monde en chair et en os, et ça oui, ça reste un vrai rêve à accomplir...
Un disque à écouter sur un nuage ?
D’Angelo - Brown Sugar.
La surprise
En attendant de nous envoyer sur un nuage avec Indian Summer, à paraître en exclu sur notre compilation, 7even Sun nous a déniché un instru inédit enregistré en 2008. Ça s’appelle Flyinhigh et même sans MC pour y poser son flow comme envisagé au départ, le smoothie en question a tout ce qu’il faut pour nous faire planer mais sans trop nous lâcher la bride, juste à la bonne hauteur :
Quelques liens utiles
A écouter et télécharger librement :
Clouds et Clashes, les deux premières parties de notre compilation - qui en comptera trois.
A lire également dans notre série :
Interview sous les cendres - 1/ Tapage
Interview sur un nuage - 1/ Arno Mori
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