Grizzly Bear - Yellow House
Envie de vous échapper, de partir au loin, de rêvasser et flâner, le deuxième album des étonnants Grizzly Bear vous attend …
1. Easier
2. Lullabye
3. Knife
4. Central and Remote
5. Little Brother
6. Plans
7. Marla
8. On a Neck, On a Spit
9. Reprise
10. Colorado
De cette maison jaune, je ne pourrai par contre vous donner la clé. C’est à vous d’essayer de la trouver, même si cela peut paraître difficile au premier abord, mais une fois que l’on y est entré, on s’y sent comme chez soi, on n’a plus envie d’en sortir. On peut y parcourir les différentes pièces aux multiples facettes, monter ou descendre les escaliers en bois selon notre humeur, découvrir des merveilles cachées au fond des tiroirs ou de vieilles malles, ouvrir les fenêtres pour laisser pénétrer la brise marine ou entendre les chants d’oiseaux. Cette maison respire la mélancolie et la nostalgie, ce qui n’est pas si étonnant, vu qu’il s’agit de la maison de la mère du chanteur Edward Droste, dans laquelle le groupe s’est retiré pour ce deuxième album. A l’évidence, de nombreux souvenirs ont dû ressortir au fur et à mesure de l’enregistrement de ces 10 superbes morceaux le plus souvent émouvants.
Déjà, Grizzly Bear avait surpris par son premier album Horns of Plenty sorti en ce début d’année. En provenance de New York (décidément cette ville ne dort jamais et ne cesse de nous révéler des groupes qui sortent des sentiers battus), tout comme leurs voisins de Animal Collective, le groupe redéfinit les frontières d’une folk psychédélique et expérimentale, mais le plus souvent intimiste. A l’origine Grizzly Bear était le projet de l’unique Edward Droste qui écrivait ses chansons dans sa propre chambre, chansons qui allaient justement composer ce premier album. Aujourd’hui, il s’agit d’un quatuor avec l’arrivée de Christopher Bear aux percussions, Chris Taylor à la basse et aux parties électroniques, et Daniel Rossen en second chanteur guitariste, qui peut ainsi se permettre toutes les excentricités et folies sorties de l’imagination foisonnante et débridée du chanteur.
Pour nous accueillir dans cette maison, rien de tel qu’un piano qui semble venir d’un autre temps et dont quelques notes jazzy sont jouées. Rapidement, la lumière fait son apparition sur Easier avec ses arrangements rayonnants et des chœurs qui nous appellent à entrer. La batterie est discrète et douce, un banjo accompagne nos pas. Il est impossible de résister, le charme et la curiosité nous poussent à avancer encore et encore. Surtout que Lullabye semble poursuivre sur la même lancée, une guitare sèche, un piano, une flûte et je ne sais quel autre instrument, nous invitent tout en douceur à découvrir ce nouvel endroit, mais progressivement le chant choral devient mystique et presque inquiétant, la musique partant dans des divagations sonores et psychédéliques sous acide comme aux débuts des Mercury Rev. Certes la musique des Grizzly Bear est moins noisy et plus folk, mais l’influence de ce groupe semble évidente à l’écoute de morceaux comme Central and Remote qui aime prendre à contre-pied l’auditeur, dans des envolées vocales et instrumentales délirantes.
Néanmoins le groupe sait aussi rester simple avec Knife, ballade lo-fi à une guitare, le soleil nous caressant le visage, au son de chœurs beach-boysiens, perdus dans nos pensées, le regard vers l’infini.
Et de cette fenêtre, revenons un peu à l’intérieur avec Little Brother, nostalgique mais qui donne envie de frapper des mains au rythme des coups de batterie. On croirait cette chanson sortie du répertoire de Midlake, la même sensibilité, une orchestration magnifique, une ambiance magique avec ces gazouillements d’oiseaux. A l’image des Texans, Grizzly Bear a su mettre au profit les moyens qui lui étaient donnés pour ce second album avec une production riche et ambitieuse mais parfaitement réussie. Il suffit d’entendre On a neck, on a spit, le morceau le plus accompli qui se déroule en deux temps. Au départ, un banjo nous offre une country délicate, pour se terminer dans une mélodie à l’ascension irrésistible qui donne du baume au cœur et l’envie de claquer des doigts. Tout comme Plans au rythme lent qui nous emmène avec ses sifflements et au son de petits bidouillages et rythmiques électroniques vers le simple bonheur et un final en apothéose.
Au début, je parlais de vieilles découvertes que l’on pouvait faire dans cette maison, on peut dire que le chanteur doit ressentir une sensation toute particulière quand il chante Marla, une chanson retrouvée de sa grand-tante venue tenter une carrière à New-York dans les années 40 sans connaître le succès. En tout cas, aujourd’hui, il y a de l’espoir pour que le groupe d’Edward Droste connaisse un certain succès et qu’il ne nous laisse pas avec cette dernière chanson Colorado, longue et lente complainte lâchée comme un adieu que l’on espère n’être qu’un au revoir...
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