Depuis Illinoise et l’attente qu’aura suscité une éventuelle nouvelle étape de son tour des états américains, on a pris l’habitude de ne jamais avoir ce que l’on attendait de la part de Sufjan Stevens, sans être forcément toujours déçu. Ainsi, The Avalanche en 2006 ressemblait davantage à un véritable album qu’à une collection de fonds de tiroirs, et les Songs For Christmas valaient leur pesant de pépites sur pas moins de 5 CD pour plus de deux heures de relectures touchantes ou jouissives mais toujours désarmantes.
L’année 2009 pourtant fut moins radieuse pour les fans de l’américain, entre les hybridations électro-orchestrales pas toujours heureuses de The BQE et les relectures minimalistes et dissonantes par le quatuor Osso du curieux Enjoy Your Rabbit de 2001, plus intéressantes mais aussi plus ardues, rien quoi qu’il en soit qui puisse rappeler de près où de loin la folk aux choeurs célestes et aux arrangements virevoltants des deux pierres angulaires de la discographie du bonhomme, Michigan et Illinoise.
Et alors même que l’on commençait à désespérer d’un nouvel opus dans cette lignée lyrique et majestueuse avec l’annonce d’un prochain album au son plus noisy influencé par Sonic Youth, voilà qu’un "EP" digital de près d’une heure vient nous cueillir par surprise. Construit autour de deux versions de son morceau-titre, "hommage dramaturgique à l’Apocalypse, à l’ennui existentiel et au Sounds of Silence de Paul Simon" selon son auteur, All Delighted People nous balade ainsi d’odyssées acoustiques luxuriantes au souffle épique en respirations poétiques, de comptines country-folk enchanteresses en digressions électro barrées, d’impros dissonantes en arrangements dignes des soulmen de la grande époque, avec pour fidèle compagnon de route le fameux banjo ressorti du grenier. Ça se passe dès aujourd’hui sur bandcamp, écoute gratuite comme de coutume sur le site et téléchargement à peine plus onéreux, le Sufjan est généreux et sa musique vient une nouvelle fois de nous le prouver.