Cruel Diagonals - Fractured Whole
1. Penance
2. Precipice
3. Lament
4. Synectics
5. Vestigial Mythology
6. Inurement
7. Reconciliation
8. Ache Of Surrender
9. Heavy Is The Sea
10. Intuit Sensate
11. Decimated Whole
Sortie le : 24 mars 2023
D’une électronique dronesque et pulsée aux textures organiques, les méditations ésotériques de la Californienne Megan Mitchell ont peu à peu évolué, depuis le superbe Disambiguation et son prolongement dark ambient l’EP Monolithic Nuance jusqu’à ce Fractured Whole nettement plus désincarné et pourtant tout aussi prenant. Déjà bien fantomatique, A Dormant Vigor avait donné le ton en 2021 : Cruel Diagonals commençait à y déconstruire sa voix sur des nappes toujours post-industrielles et noisy mais au feeling plus digital. Un pas vers l’abstraction qui allait de paire avec des vocalises décomplexées et qui accouche ici, deux ans plus tard donc, d’un véritable requiem futuriste aux lamentations vocales rudoyées et démultipliées en vortex irradiés où les bourdons, crépitements et autres élégies synthétiques ont définitivement pris le pas sur les percussions mystiques captées en direct, dimension ritual ambient aux abonnés absents sur ce quatrième long format en 5 ans.
En contrepartie, on y gagner un sens du crescendo assez terrassant (Penance, Heavy Is The Sea) et des contrastes saisissants entre la musique, toujours caverneuse, et cette voix irréelle passée au vocoder (au point que l’on pense par moments, sur Decimated Whole par exemple, aux chœurs japonais des BOs de Kenji Kawaii pour les animés de Mamoru Oshii ou aux expérimentations de Sabiwa), pitchée sans vergogne jusqu’à la frontière du bon goût (Vestigial Mythology) et empilée jusqu’au vertige, désormais traitée comme un instrument électronique à part entière et dont les motifs découpés au scalpel, parfois glitchés et transformés en rythmiques plus ou moins déstructurées (Precipice, Synectics, la quasi techno du final de Reconciliation ou cette façon sur la deuxième partie de Heavy Is The Sea d’en jouer comme on le ferait des notes d’un clavier), semblent célébrer l’avènement d’une union contre nature entre l’Humain et la machine, l’empathie malmenée d’une psyché fracturée et la froide enveloppe digitale vouée à en recueillir les vestiges.
Un vrai, grand et beau manifeste de l’époque qui demeure absolument immersif et paradoxalement viscéral, à rebours donc de ceux que l’on prête un peu trop facilement à des artistes aussi tape-à-l’oeil et pseudo expérimentaux qu’OPN, Eartheater, The Knife ou Arca.
180 albums, car si la frustration demeure de ne pas en citer 100 ou 150 de plus, c’est là que la césure s’avérait la plus supportable en cette année 2023 riche en pépites sous-médiatisées. 180 disques, car le but d’un bilan annuel, de la part d’une publication musicale quelle qu’elle soit, ne devrait pas revenir à montrer que l’on a sagement écouté la (...)
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