Place aux images, même si cette nouvelle rubrique IRM n’est pas exactement vouée à se passer de mots. Elle nous donnera en effet l’occasion de nous pencher régulièrement sur des albums laissés de côté faute de temps ou des singles annonciateurs ou non de sorties attendues.
Markus Acher (The Notwist, 13&God, Hochzeitskapelle, etc) chille au Japon avec les Tenniscoats sur cet extrait réconfortant du nouveau Spirit Fest, leur projet commun dont le 3e opus (un double, mais pas trop long) sort dans un mois chez Morr Music. On y retrouve avec bonheur leur pop acoustique pastorale aux arrangements bricolés, et cette évidence mélodique qui ne fait jamais défaut tant à l’Allemand qu’à ses correspondants nippons :
Extrait de l’album de confinement du trio emmené par Patrick Masson, le superbe Corpo qui vient de voir le jour en CD-r, Play déroule une techno indus aussi étrangement organique et radicalement hypnotique que les images en noir et blanc qui l’illustrent, des visions fantasmagoriques qui doivent autant à David Lynch qu’à l’esthétique dérangeante de l’indie des 90s :
Tellement de Ill-machins ces derniers temps dans l’underground ricain que ça devient difficile de s’y retrouver ! ILL Conscious toutefois, particulièrement acéré sur ce beat d’un certain Mute Won évoquant les atmosphères futuro-nippones des animés de Mamoru Oshii, fait partie des très bons et celui que l’on compare déjà à Big Pun devrait confirmer prochainement sur un 5e album où l’on retrouvera notamment Planet Asia :
Le musicien ambient néerlandais offre à la pépite de 13 minutes de son récent Dwingeloo Life Extension fortement conseillé aux fans d’Angelo Badalamenti une vidéo irréelle à base d’images d’archives de Hong Kong et de son chassé-croisé d’avions de ligne, un moment suspendu où l’onirisme rétro-futuriste du morceau, tantôt en adéquation avec ce ballet aérien ou en contraste avec le grouillement urbain, procure une étrange sensation de calme avant l’apocalypse qui sied tout particulièrement à ces temps troublés :
On fait table rase et on médite un coup avant de reconstruire, semblent vouloir nous dire Le Crapaud & La Morue dans ce clip tout nouveau tout bricolo des déjà fameux (surtout en live) Compagnons Paveurs de leur album de 2018 Franche Camaraderie. (Super)positions de yoga incongrues, manifs et coups de masse y côtoient le lyrisme du chant et des claviers, les coups d’éclat noise et les coups de frein syncopés aux accents dub qui font de cette tragédie prolétaire décalée un OVNI aussi touchant qu’incandescent :
Pas faute d’en avoir entendu parler avant tout le monde par l’intéressée, on était finalement passé à côté de ce deuxième opus de Barbara Panther, suite très attendue par ici et sortie en catimini l’été dernier d’un éponyme que l’on a beaucoup écouté. La publication du clip de même nom est donc également l’occasion d’un petit rattrapage de rigueur, car Feminine ne brille pas seulement par le lyrisme irrésistible de cette ode éponyme à la féminité de la nature, mais par toute une série de vignettes fébriles et baroques évoquant le tropicalisme bricolo des débuts de The Knife, entre tradition africaine et futurisme électro-pop, à écouter notamment sur Youtube :
On reviendra sans doute bientôt sur ce nouveau chef-d’œuvre bucolique de l’Italien Francesco Giannico, qui semble déterminé à lui attribuer une vidéo par morceau pour le plus grand bonheur de nos mirettes. Parmi les 4 déjà publiées, c’est celle du titre introductif de Destroyed By Madness qui nous a le plus fascinés, offrant dans un scope somptueux un écrin de rêveries aquatiques à ce bijou de néo-classique stellaire aux glitchs envoûtants :
Ballet hypnotique de textures organiques, la nouveau clip de Nicotine pour le groupe Dead épouse comme souvent avec le vidéaste croisé à plusieurs reprises sur notre compil Twin Peaks le rythme des beats, des riffs, des drones et autres reflux texturés. À visionner en plein écran et en HD, à moins d’être épileptique car les effets stroboscopiques y sont à la mesure des pulsations de lumière noire de la musique des Rennais sur cet EP dont est extrait le Shine en question, quelque part entre le shoegaze noisy d’APTBS et une coldwave industrielle :
Curly Castro et PremRock se sont mis sur leur 31 pour ce clip tiré de l’excellent premier long-format de ShrapKnel sorti il y a quelques semaines sur le label de Billy Woods, mais pas la peine d’essayer de nous rouler les gars, on a bien vu que vous aussi vous étiez confinés... ceci dit avec Elucid aux beats et l’ami Blueprint à la caméra ils doivent pas s’ennuyer les New-Yorkais, et nous non plus en l’occurrence tant on croirait entendre Aesop Rock et Vordul Mega sur ce titre mystique et martelé à la MPC ou apparenté :
La nature ça fait du bien quand on est enfermé, merci donc à Frank Rabeyrolles pour le dépaysement de circonstance. Le Montpelliérain apprécié notamment dans ces pages pour son projet Franklin sortira bientôt un nouvel album Materia Prima dominé par les claviers et synthés et nous en offre un premier extrait bucolique à souhait qui finit comme son clip par décoller pour la voie lactée et augure du meilleur pour ce virage électronica/ambient à la sensibilité mélodique intacte :
On ne connaissait pas le moins du monde les trois Canadiens de ce nouveau projet estampillé Hand’Solo Records, habitués des battles pour certains, et pourtant à l’écoute de leur très chouette The Broken Plan, les amateurs du meilleur label indie rap de la décennie écoulée sont d’emblée en terrain connu, entre un boom bap 90s plutôt sombre auquel fait écho cette vidéo qui évoque les beuveries des paumés de Twin Peaks dans les bois environnants où rodent les esprits de la Loge, et l’alt-rap ludique et décalé des compères de Backburner :
Moitié de Body/Head avec Kim Gordon de Sonic Youth, l’Américain Bill Nace gagner à être connu en solo mais si la disco déjà pléthorique de ce stakhanoviste de l’expérimentation et de l’improv à guitare - qui l’a notamment vu cotoyer Samara Lubelski, Chris Corsano, Mats Gustafsson ou Thurston Moore - vous intimide un brin, autant attendre le prochain LP Both qui sort fin mai chez Drag City et dont ce clip de textures au fusain aux inquiétantes ombres chinoises épouse le minimalisme rugueux et dissonant du morceau :
Bonus :
N’oubliez pas de sortir votre enfant de temps en temps pendant le confinement, sinon il pourrait devenir le nouveau Mozart et là c’est le drame... chaîne youtube, hypersensibilité, Carnegie et Royal Albert Hall, les albums de Glenn Gould en boucle à la maison et pas le temps de dire ouf que voilà votre rejeton le nouveau chouchou de tout un pays privé de sortie. Pas mal pour son âge il faut l’avouer, cette compo dédiée aux gens qui souffrent de la pandémie et de ses conséquences de part le monde, mais il va quand même falloir qu’il passe un cap à ses 8 ans le petit Stelios sinon pas la peine d’insister hein...