Cigarettes After Sex - Cry
Deux ans après un premier album homonyme, Cigarettes After Sex récidive. Le terme n’est pas galvaudé puisque Cry ressemble en tout point à son prédécesseur. Est-ce pourtant problématique ? Non.
1. Don’t Let Me Go
2. Kiss It Off Me
3. Heavenly
4. You’re The Only Good Thing In My Life
5. Touch
6. Hentai
7. Cry
8. Falling In Love
9. Pure
Certes, les détracteurs - et ils sont nombreux, y compris dans nos colonnes - diront que Greg Gonzalez n’a pas fait avancer l’identité du projet d’un iota durant ces deux années. C’est sans doute vrai, même si les aficionados de l’Américain trouveront davantage de mélodies ou une production plus léchée sur ce Cry. Ils - les détracteurs - moqueront également l’auto-caricature que frôle Cigarettes After Sex avec ce titre - Cry -, sa pochette en noir et blanc représentant une mer arrosée par une pluie dense et la redondance des thèmes de l’amour et de la séduction dans les paroles. Ils auront à nouveau raison.
Et l’on pourrait même ajouter que, non content de proposer un disque déclinant la même ambiance sur neuf morceaux, Cigarettes After Sex reproduit l’humeur déjà présente sur les dix titres de son premier opus. Alors quel est l’intérêt de ce Cry ? La réponse réside dans le fait que les dix morceaux - allez, écartons cet Opera House un brin décevant - du premier album avaient été usés jusqu’à la moelle lors d’écoutes compulsives pendant deux ans, sans jamais générer d’overdose. La recette n’est pas bourrative.
Comment peut-on se passionner pour les multiples subtilités de certains courants de la musique électronique bâtis autour de la redondance de ses thèmes, pour ensuite décrier l’enrobage similaire du son de Cigarettes After Sex ? Car il n’y a bien que l’enrobage qui est similaire. La voix de velours de Greg Gonzalez, une batterie minimaliste - voire fainéante -, des claviers divins et des guitares (ab)usant de la réverbération. Ce slowcore pourrait être considéré comme une version masculine et réactualisée de Mazzy Star, mais il n’y a pas besoin de choisir entre le génie de Hope Sandoval et celui de Greg Gonzalez.
Que l’on perd de temps, avec Cigarettes After Sex, à se justifier d’aimer - voire d’être ensorcelé par - ces ambiances, il est vrai, similaires. Mais à l’écoute des arpèges d’un Pure concluant admirablement le disque en lorgnant plus que jamais vers une musique indé - savourons, Cry s’affichant en tête de gondole des magasins spécialisés, la hype risque de nous "voler" ce bijou... tant mieux pour eux - façon The National époque Boxer , comment ne pas apprécier l’évidence mélodique qui fonde le noyau dur des compositions de Cigarettes After Sex au-delà d’un enrobage que certains pourront qualifier d’artificiel ?
Comment peut-on admirer le sens mélodique d’Elliott Smith - même si ceux qui se réclament de son influence sont de moins en moins nombreux, cela reviendra - sans être sensible à celui de Cigarettes After Sex ? Le sommet Touch, peut-être la plus belle composition écrite par Greg Gonzalez, pourrait étonner quelques sceptiques. La recette semble toujours être la même, la musique peut parfois sembler un brin fainéante, mais lorsque les claviers se lovent dans les reprises vocales de l’Américain, il faut sans doute avoir un cœur de pierre pour ne pas être charmé.
Passons sur Heavenly, Falling In Love, Kiss It Off Me ou l’introductif Don’t Let Me Go, toutes admirables et désarmantes mais dans la droite lignée du premier album, pour évoquer quelques évolutions qui apportent ces (évidemment légères) nuances malgré tout indispensables. La guitare ronde qui accompagne l’ouverture de Cry, les synthés plus colorés d’un Hentai coquin ou l’impassible You’re The Only Good Thing In My Life et son panel de sentiments assez indomptable, nous laissant entre abattement et espoir, avec toutes les graduations qui s’invitent évidemment au milieu.
Tel est peut-être le mantra - ou la grande réussite - de Cigarettes After Sex : même après des écoutes répétées d’un thème s’approchant toujours de ses travaux précédents, le groupe, qui a enregistré cet album de nuit dans un manoir de Majorque, nous surprend toujours par le large spectre d’émotions qu’il offre comme support à l’imaginaire de l’auditeur.
Une nouvelle décennie vient de débuter. Nous aurons bien le temps de revenir sur la précédente mais, dans la mesure du possible, faisons les choses dans l’ordre. Priorité au court terme. L’année musicale ayant été vécue avec un peu moins de passion qu’à l’accoutumée, ce top s’appuie essentiellement sur les compositions de valeurs sûres. Le temps permettra (...)
Quel axe choisir pour parler de ce troisième album de Cigarettes After Sex ? Essayer de mettre en avant ses qualités pour convaincre ceux qui - majoritaires dans les couloirs de la rédaction - sont réfractaires ? Probablement inutile : ceux qui n’ont guère apprécié les ballades vaporeuses concoctées par la bande de Greg Gonzalez ont peu de chance (...)
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