G. Lolli - Capire Il Mistero
Capire Il Mistero, nouvel opus de G. Lolli (que l’on connaît très bien sous le nom de Dr Geo par ici), n’aura aucun mal à vous capturer. Agrégats sonores luxuriants, B.O. fantasmées, élégantes ou abstraites, reggae, pop, ambient sous toutes ses formes, il y a tout cela sur ce disque et bien plus encore. Le tout consigné en vingt morceaux seulement. Une gageure. Et surtout, une réussite.
1. Luna Di Sangue (The Blood Moon)
2. Oltre Ogni Ragionevole Dubbio (Reasonable Doubt)
3. Sogno A Occhi Aperti (The Dying Dream)
4. Domani Lo Sempre Sa (Certainties)
5. Il Cacciatore Di Androidi (The Android)
6. Destino Ineluttabile A Cui Non Si Puo Sfuggire (The Great Escape)
7. Il Giro Del Dottore (You Guys Have Fun)
8. Capire Il Mistero (A Mystery Doesn’t Need To Be Understood)
9. La Furia Nel Sangue (Guts)
10. Paura Nei Tropici (Sunlight Murders)
11. Vista Panoramica Della Citta Eterna (The Eternal City)
12. La Ragazza In Nero (The Lady In Black)
13. Attraverso Lo Specchio (Through The Mirror)
14. Bhopal
15. Come L’Aria Che Respiriamo (You’re The Air I Love To Breathe)
16. Alla Fine Non Ha Fine (The End Has No End)
17. Preludio Di Una Tragedia (Tragedy)
18. La Quiete Prima Della Tempesta (Calm Before The Storm)
19. Staring At The Sea
20. Alba Tragica (Aube Tragique)
Bel objet tout blanc caché derrière une élégante photographie où les nuages naissent entre les montagnes, Capire Il Mistero porte bien son nom. Ou le porte mal. C’est qu’on n’a pas vraiment envie de comprendre le mystère ou de cerner l’alchimie à l’œuvre ici. On connait Dr Geo, son goût pour le métissage, sa curiosité instrumentale insatiable qui l’avait poussé à faire de l’optigan la pièce maîtresse de The Lo-Fi Studies, ses explorations tous azimuts qui sonnent invariablement bien et retombent systématiquement sur leurs pattes. On savait donc un peu à quoi s’attendre avant même d’avoir jeté une oreille sur les vingts titres que compte son nouvel opus. On savait à quoi s’attendre mais on ne s’attendait pas à ça. On comprend très vite pourquoi Dr Geo s’est mué en G. Lolli (son vrai nom). On comprend très vite aussi pourquoi Capire Il Mistero. Cette fois-ci, le Doc explore de nouveaux horizons et propose un disque qui, de prime abord, présente tous les aspects de l’exercice de style et ressemble à s’y méprendre aux scores pour films de genre ’70s (polars nerveux, pamphlets politiques ou libertaires, films de boules, etc.), se baladant sur la botte de l’Italie tout du long. Toutefois, l’album touche à une telle multitude de styles que l’on ne saurait le cantonner à la simple imitation. Capire Il Mistero est tellement plus que cela. D’abord, il ne fait aucun doute que Lolli ne s’interdit absolument rien et qu’il ne cherche pas une quelconque unité, encore moins une cohérence. Que l’ensemble puisse alors sonner si unitaire et cohérent, voilà sans doute le vrai mystère à élucider. Parsemés d’emprunts à droite à gauche, du reggae à l’électro, du jazz au trip-hop - et encore, on ne s’en tient là qu’aux accents aisément identifiables, il y en a de nombreux autres bien plus enfouis et savamment planqués dans la mixture - ses morceaux sont avant tout infiniment personnels, ce qui les éloigne définitivement de la pâle imitation redoutée et des tristes émotions en conserve.
On ressent beaucoup, profondément, en permanence et au fur et à mesure que se succèdent les vignettes sonores et luxuriantes, ce qui n’était au départ qu’une impression fugace se meut en certitude : on est bien face à un vrai beau bloc de créativité foisonnante. Portée par une multitude d’instruments, la richesse ne se trouve pourtant pas seulement dans les arrangements mais aussi dans les émotions et images convoquées tout du long. L’ensemble renferme vingt titres mais à aucun moment on ne sent poindre les longs doigts gris de l’insipide ou de l’ennui. Capire Il Mistero coule comme un fleuve épais au chevelu inextricable et rien ne semble pouvoir arrêter sa course : introspectives, hallucinées, capiteuses, tristes à mourir, hyper sexuées ou au contraire froides comme la glace, contemplatives ou exacerbées, les ambiances deviennent de vrais morceaux et les morceaux s’aplatissent devant les climats mis sur pied. Le tout sans se départir d’un groove nucléaire qui fait vibrer constamment l’épiderme. Même si tous sont également prenants, certains morceaux brillent d’un éclat aveuglant : Oltre Ogni Ragionevole Dubbio, sa vibration mélancolique et anglaise à la John Barry et sa grosse basse racée, Domani Lo Sempre Sa, au souffle funk très blaxploitation, Capire Il Mistero, luxuriant et ultra-mélodique, Vista Panoramica Della Citta Eterna rappelant de loin Jean-Claude Vannier, Attraverso Lo Specchio, étouffé et capiteux, Bhopal le bien nommé ou le sublime Come L’Aria Che Respiriamo, voire le très pop Staring At The Sea (un des rares morceaux chantés [par Flore Ujma] dans cet océan instrumental)... C’est bizarrement triste en permanence mais aussi invariablement joyeux, on se balade dans tout ça par n’importe quel bout, on commence par la fin ou le milieu, on remonte au début et on saute des morceaux dans l’intervalle, puis on reprend tout dans l’ordre, peu importe, on arrive toujours au même endroit : le réseau intérieur, celui de G. Lolli mais aussi le nôtre.
Inutile de dire que l’on voyage beaucoup, dans l’espace et dans le temps et que l’on reste sidéré par tant de maîtrise et par le nombre ahurissant d’idées que renferme Capire Il Mistero. Un disque dense mais jamais hautain, un vrai travail d’orfèvre, une jungle luxuriante que l’on ne s’étonne donc pas de retrouver estampillée du vénérable logo Specific Recordings. Qui d’autre pouvait sortir un vinyle tel que celui-là, tout à la fois puriste et fureteur ? Alors, on n’est peut-être pas très sûr d’avoir percé le mystère promis par le titre mais comme « A Mystery Doesn’t Need To Be Understood », dont acte. On préfère laisser de côté les vaines tentatives d’analyse pour simplement écouter et partir en errance dans le blanc immaculé de ce bout de plastique franchement captivant.
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