Le streaming du jour #1458 : Sylvain Fesson - ’AMY (I) & AMY (II)’
Déjà auteur de l’EP Sonique-Moi en 2015, Sylvain Fesson privilégie de nouveau le court format avec deux volumes intitulés AMY (I) et logiquement AMY (II), qui viennent ainsi prolonger son univers tourmenté.
AMY (I) débute sur un Jo Lee qui s’étire sur plus de douze minutes avec le spoken word de Sylvain Fesson sublimé par quelques notes de piano battant une rythmique complétée par une délicate nappe, qui s’impose comme le fil conducteur de ce titre composé de différentes parties s’inscrivant sur un thème similaire et séparées par des pauses instrumentales.
De nécessaires répits car la tension est en permanence palpable. Le non-dit s’impose sur ces "poèmes rock" tels que les définit lui-même Sylvain Fesson. Sur AMY (I), le piano et le saxophone, joués par Sandro Mariotti, déclinent des paysages sonores jamais austères mais sur lesquels plane une menace quasi-permanente.
Une menace qui devient plus prégnante sur un AMY (II) constituant le pendant ouvertement plus sombre de ce diptyque. Une tendance qui s’observe aussi bien au niveau des textes ("Je te préfère morte, Amy Winehouse") que sur l’aspect musical, le piano s’effaçant pour laisser la place aux guitares, synthétiseurs et violoncelle.
Plus classique mais au moins aussi somptueux, le sommet Anathème marie le spoken word mi-hanté, mi-désabusé du Parisien à des arrangements de cordes raffinés rejoints ponctuellement par des digressions électriques. Les spectres de lufdbf ou de Michel Cloup apparaissent alors.
Celui d’Alain Bashung n’est jamais très loin non plus, pour cette capacité commune à manipuler délicatement les mots. L’auteur de Fantaisie Militaire aurait tout à fait pu énoncer lui aussi - et d’une manière similaire dans le débit - ce "elle a ripé... failli" sur Jo Lee, tandis que l’hommage est évident lorsque Sylvain Fesson évoque un "soldat sans joie" sur Amy II.
Le statut de "poème rock" est finalement assez juste tant les compositions de Sylvain Fesson refusent de sacrifier quoi que ce soit entre la déclamation habile de mots emplis de maux et la délicatesse de structures soniques hantées. Un diptyque ambitieux mais abordable, abrasif mais jamais plombant, d’une qualité évidente, en somme.
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