ZULUS - II
En provenance de Brooklyn, ZULUS injecte beaucoup de bruit dans la carcasse de son rock’n’roll. Frénétique et jubilatoire.
1. Revolver III
2. Medications
3. White Virgin
4. Gemini
5. Set Fire
6. Chemicals
7. Deep into the River
8. Screens
9. The City’s Vein
Vingt minutes et puis s’en va. Neuf titres tout de même. Tous identiques, tous différents. Une voix chargée de réverbération, pas vraiment en avant mais au même niveau que tout ce qui l’entoure. Pas complètement crade mais vraiment mal peignée. Une voix qui diffuse son entropie aux instruments. Un gros grain, bien dégueulasse, délimite le disque. On le doit à ZULUS et c’est son deuxième, justement intitulé II. On sent bien que ces quatre-là ne cherchent ni l’embellissement, ni la fioriture. La pochette le prouve. Sobre et hideuse (signée Hazel Lee Santino). Un peu l’inverse de la musique, certes renfrognée mais vraiment accorte pour peu que l’on en gratte le bruyant épiderme. Rock’n’roll à tous les étages, vibration punk omniprésente et bruit partout. On dirait du Scientists visqueux ou une version outrée des Cramps, un décalque approximatif et baveux au marqueur noir pointe XXL. Mais qu’on ne s’y trompe pas, derrière la saleté se cachent des choses tirées au cordeau et c’est bien tout le paradoxe d’un album aux morceaux aussi bien construits qu’ils sonnent de guingois. Un paradoxe qui confère tout son sel à ZULUS. La batterie tatapoume à qui mieux mieux, la guitare déborde de partout au même titre que la voix et la basse fournit la masse caoutchouteuse qui agglutine le tout. Arrachés, souvent véloces, quelque fois patraques, les titres filent d’autant plus vite qu’ils sont souvent courts (deux minutes en moyenne) et qu’ils varient leurs intentions.
Adepte de la fuite en avant (Revolver III ou Medications en ouverture, Chemicals plus loin), arc-bouté sur une répétition cinglante (Gemini et son groove motorik) voire complètement plombé (le bien nommé Deep Into The River), II aime nuancer son garage. Et puis, de temps en temps, un embryon de mélodie s’échappe du bordel ambiant à l’instar du très malin The City’s Vein qui clôture d’ailleurs l’album et voit ZULUS exposer l’évidence du morceau bien au-dessus des scories noise et des échardes sonores. Une évidence qu’il préfère camoufler partout ailleurs sous une tonne de delay mais qui existe néanmoins et qui inonde le moindre titre. Bien ficelés, bien amenés, sans longueur ni remplissage, White Virgin, Set Fire, Screens et compagnie disparaissent comme ils sont apparus, dans un grand fracas, lui-même à l’origine d’un sourire plus grand encore sur les lèvres de l’auditeur. Il faut dire aussi que les quatre ZULUS - Daniel Martens, Aleksander Prechtl, Jeremy Scott et Julian Bennett Holmes - ont pas mal roulé leur bosse et gardent de leurs origines punk-hardcore (Battleship, Aa ou encore Prsms par exemple) ce qu’il faut de rage et de concision pour empêcher leur garage au gros grain de ronronner. Un son radical, des morceaux bien construits, une réelle variété et pas mal de sobriété, ZULUS maîtrise son sujet et livre avec II un disque clair-obscur fortement addictif. Il ne dure que vingt minutes mais paraît néanmoins plus long, il bouscule mais n’épuise pas et se montre en permanence jubilatoire. Aucun risque d’indigestion donc, quoi qu’en pense la demoiselle sise au beau milieu du noir abyssal de la pochette.
Imparable.
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