Le streaming du jour #1185 : Daedelus - ’The Light Brigade’
Fort de l’honnête retour en forme d’un Drown Out relativement sobre et minimaliste au regard des maelstroms baroques et colorés auxquels l’ancien beatmaker phare de Mush Records nous habitue depuis bientôt 15 ans, Daedelus fait le pari passée l’entame drone féérique du vacillant Until Artillery de se priver d’électronique sur son nouvel opus The Light Brigade, d’autant plus osé pour un disque qui sort sur le label (Brainfeeder) du parrain du glitch-hop (Flying Lotus, dont l’enivrant You’re Dead ! au jazz psyché tourneboulant aura bientôt l’honneur de cette rubrique).
Si l’EP Righteous Fists Of Harmony, précédente sortie Brainfeeder du dandy de L.A. inspirée par la révolte des Boxers au tournant du XXème siècle en Chine, n’avait pas follement convaincu, il n’en est heureusement pas de même de cette seconde leçon d’histoire revue et corrigée par le touche-à-tout Alfred Darlington. Évocation de la guerre de Crimée, qui trouve un écho somme toute assez troublant dans les dérives expansionnistes du régime de Poutine bien que l’album ait été composé avant les récents évènements d’Ukraine, The Light Brigade surprend d’emblée par ses tonalités élégiaques et ouatées, faisant la part belle à l’acoustique d’une guitare piquée et aux harmonies vocales éthérées du Californien qui n’avait jusqu’ici pris le micro aussi ouvertement qu’au côté de son épouse Laura, sur le charmant premier opus au spleen bucolique et dépaysant de leur projet pop The Long Lost.
Répondant aux élans électro-liturgiques en clair-obscur du sus-nommé Drown Out (Anticon, 2013) mais avec une douceur inédite pour cet agité du bocal coutumier des télescopages rétro-futuristes au groove savamment arythmique, The Light Brigade décevra forcément dans une certaine mesure ceux qui ne jurent que par l’inventivité virtuose de l’auteur d’Exquisite Corpse et du génial Denies The Day’s Demise. Qu’importe, la vérité est ailleurs, dans les résonances célestes de chœurs enveloppants (Onward, avec le complice Young Dad au falsetto qui renvoie le néo-gospel de James Blake au placard), les rares affleurements contrastés des synthés (Tsars And Hussars) et la poésie acoustique de ces délicates sérénades allégoriques, odes aux traces laissées dans les cœurs des peuples par les tragédies de l’Histoire, une humanité à laquelle les cordes funestes et déchirantes du final Country Of Conquest laissent peu d’espoir de rédemption.
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