Duo new-yorkais fasciné par les collages surannés, la sci-fi vintage paranoïaque et les atmosphères de l’entre-deux guerres, The Fucked Up Beat est à à la musique de chambre, au jazz et au blues de la première moitié du XXème siècle ce que The Caretaker fut ces dernières années aux standards poussiéreux et au néo-classique lyrique de cette même époque, des passeurs de détresse, d’angoisse et de schizophrénie sous la nostalgie de façade qu’évoquent de prime abord les boucles de samples fantasmatiques, de chants plaintifs et de piano funeste de ces transmissions d’un autre temps.

Si le beatmaker/field recorder Brett Zehner et l’instrumentiste/échantillonneur Eddie Palmer qualifient volontiers leur univers de "trip-hop noir", c’est une atmosphère décrépie et voilée d’ambient hantologique et de darkjazz anachronique parfois proche également des derniers travaux de L. Pierre (cf. 14 April 1935 et Cloud Poems dont les références crépusculaires au Prélude op. 3 n° 2 en do dièse mineur de Rachmaninov forcent la comparaison avec Harmonic Avenger sur le fabuleux The Island Come True sorti en début d’année) que nous évoque ce 12ème opus en deux ans tout juste, téléchargeable à prix libre via Bandcamp ou Free Music Archive comme une majorité de ses prédécesseurs.

Un refus des diktats du capitalisme rampant qui irrigue nombre de thématiques abordées par le groupe au gré de ses hymnes à la beauté des âmes touchées par la solitude et la peur de l’avenir, mais l’oblige tristement aujourd’hui à mettre la clé sous la porte faute de donations suffisantes pour ne serait-ce que conserver le matériel de base nécessaire à leur art. On vous engage donc à manifester votre soutien en cas d’affinité avec cette disco gargantuesque dont on ne fait que débuter l’exploration, et que l’on espère voir s’étoffer encore longtemps.