Le streaming du jour #741 : Ghostpoet - ’Some Say I So I Say Light’, Illogic & Blockhead - ’Capture The Sun’ & Sole - ’No Wising Up, No Settling Down’
On joue aux degrés de séparation dans le streaming d’aujourd’hui avec les trois albums hip-hop les plus attendus de cette fin avril/début mai. Et si tous ne sont pas forcément à la hauteur de nos espérances, gageons qu’aucun d’entre eux ne laissera totalement indifférent les amateurs de rap alternatif à la fois accessible et singulier.
Ghostpoet - Some Say I So I Say Light
On commence par le plus réussi et sans surprise c’est le Londonien Ghostpoet qui remporte les suffrages avec le successeur du parfait Peanut Butter Blues & Melancholy Jam de 2011. Toujours aussi dense et vaporeux dans sa production partagée cette fois avec l’ex Dakota Suite Richard Formby (The Telescopes, Wild Beasts, Darkstar...), Some Say I So I Say Light continue de creuser ce même sillon mélancolique et métissé empreint d’influences dubstep, électronica ou psyché-rock, culminant sur les ambitieuses percées orchestrales du menaçant Cold Win et du plus fervent Comatose. Tout un cheminement introspectif entre ces deux extrêmes, et si l’on pourra reprocher à l’album de rompre à quelques occasion sa belle atmosphère en clair-obscur alternant ou télescopant méditations nocturnes (Sloth Trot, Dialtones avec les backing vocals capiteux de Lucy Rose), groove nébuleux (ThymeThymeThyme, Dorsal Morsel), incursions pop aux refrains romantiques (le single Meltdown) et pics de tension plus nocifs (MSI musmiD, 12 Deaf), c’est toujours pour s’essayer avec brio à d’autres transgressions, citons notamment l’afrobeat éthéré du presque festif Plastic Bag Brain avec Tony Allen aux fûts :
Illogic & Blockhead - Capture The Sun
Ghostpoet, invité récurrent de la nébuleuse Ninja Tune à laquelle on associe naturellement Blockhead pour ses sorties instrumentales et nous voici déjà au deuxième album de la sélection, l’anticipé Capture The Sun qui voit le beatmaker historique d’Aesop Rock s’accoquiner avec le rappeur Illogic. Et le moins qu’on puisse dire c’est que l’auteur de Music By Cavelight assure, avec 16 productions funkysantes et cuivrées nourries au psychédélisme électronique et aux folklores ethniques des quatre coins du globe. De fait, même si l’on aurait apprécié quelques coups de génie supplémentaires dans la veine cinématique aux samples orchestraux de Where’s The Exit ou Finally Free, on ne peut que se réjouir devant l’élégance d’un Pillow Of Dreams à mi-chemin du blues latin et de l’abstract cosmique, les cuivres façon Axelrod de l’épique She Loves It ou les collages vintage du syncopé Atlantis Depth. Quant à Illogic, son flow limpide et résolu transcende même les titres les plus routiniers (cf. les vers asymétrique d’un Live From The Horizon au refrain digne de Gift Of Gab ou d’Anti-Pop Consortium), rejoint notamment sur le coolissime Justified par son compère Blueprint (producteur de ses trois premiers opus en solo et fondateur du label Weightless Recordings qui l’héberge depuis ses débuts), par Zero Star le temps d’un One Way Ticket jazzy et opiacé à souhait, Kristoff Krane sur le planant Lighthouse ou encore Slug pour un single éponyme quasi dub aux chorus glitchés frôlant l’insolation :
Sole - No Wising Up, No Settling Down
Slug, le rappeur d’Atmosphere que l’on retrouvait aux toutes premières heures d’Anticon sur la compil’ séminale Music For The Advancement Of Hip Hop, notamment avec le fameux Savior ? au côté du regretté Eyedea et du patron Sole, parti depuis voler de ses propres ailes en mode 100% DIY. Résultat, un inégal A Ruthless Criticism Of Everything Existing l’an dernier et sa suite directe qui nous occupe ici, manifeste d’indépendance sociale et artistique façonné dans la mouvance du mouvement Occupy au sein duquel le rappeur barbu s’est particulièrement investi. A l’image de l’opus précédent, No Wising Up, No Settling Down souffre quelque peu de la multiplication des producteurs et d’une certaine tendance à la pesanteur, l’éparpillement musical de l’ensemble et la grandiloquence de certains titres peinant à refléter la ligne directrice mûrement réfléchie d’une écriture pourtant toujours aussi viscérale et engagée. Au milieu des productions bling-bling de DJ Pain 1, Spencertron ou The Hood Internet, on retiendra donc surtout la formidable tension aqueuse du Belge Loden sur l’hypnotique People Piss Me Off, le broken beat rêveur de Gold Panda sur Extremophile et le groove cyber-organique en liberté d’un morceau-titre parfait signé Dosh d’Anticon, la tragédie guerrière des cordes de William Ryan Fritch et le phrasé désabusé de Ceschi sur Civil War, le foisonnement électronique de Man Mantis égal à lui-même sur Introfukyall... et c’est à peu près tout, mais c’est quand même déjà pas mal :
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