On parlait récemment de soutenir les ambitions musicales de João Alegria Pécurto en cas d’affinité avec le spleen livide de son album Ambleteuse. Il semble néanmoins que le guitariste portugais ne nous ait pas attendu pour aller de l’avant comme en atteste le récent Ápeiron, élégie dark ambient en dix courts mouvements pour cordes frottées (ou frappées), bruines maussades et greniers hantés qui fait du silence et des respirations le pire ennemi de l’auditeur au cœur mal accroché :

Une méthode de jeu qui prévaut également sur Amanda, nouveau format court portant à l’image de sa cover d’un noir profond le deuil de la jeune canadienne Amanda Todd, poussée au suicide par le harcèlement d’un pervers du net et les moqueries des réseaux sociaux. Une affaire qui n’en finit plus de relancer les débats sur la cyber-criminalité ces-jours-ci et que João recentre, au gré de ces cinq instrumentaux lancinants et crissants à en perdre raison, sur l’angoisse et le désespoir mêlés qu’a dû ressentir l’adolescente face à tant d’acharnement :

Quant au premier EP de Devir ("devenir" en français), également sorti ce mois-ci, il renoue brièvement entre deux passages plus atonals aux stridences inquiétantes avec les cascades d’arpèges exsangues que l’on connaissait déjà au Lisboète, au diapason de la poésie en quête d’espoir de son compatriote Bruno Sousa Villar. Un projet parallèle pour lequel les deux artistes s’influenceront mutuellement au fil des volumes :

Et en parlant de collaboration, on se quitte sur un morceau tout en craquements incandescents, percussions grouillantes et drones chancelants cosigné par João et Leonardo Rosado, un avant-goût des plus alléchants pour ceux qui comme nous ont suivi de près le parcours des deux musiciens ces dernières années :