De tous les projets dans lesquels brille ou a brillé Aaron Turner, de feu Isis à Old Man Gloom en passant par Mamiffer, Greymachine, Twilight ou encore House Of Low Culture, Jodis est assurément l’un des moins connus ou même reconnus.
Comme dans Lotus Eaters, le patron d’Hydra Head y est pourtant associé à un certain James Plotkin, empereur du mastering sludge/doom ayant lui aussi connu son heure de gloire en tant que guitariste des freaks grindcore de O.L.D. dès la fin des années 80 puis des séminaux Khanate au côté de Stephen O’Malley, futur Sunn O))) et troisième larron des sus-nommés bouffeurs de lotus.
Alors quoi, que manquait-il donc à Jodis sur son premier opus Secret House paru en 2009 et désormais en écoute via Bandcamp ? Certainement beaucoup de choses aux yeux des autoproclamés puristes du gros son, pour lesquels les étiquettes ont souvent autant d’importance que la musique elle-même. Car Jodis joue le moins pour envoûter le plus, la guitare de Plotkin traînant son spleen électrique aux riffs parfois orageux avec le flegme et la parcimonie d’un Earth, d’un Barn Owl ou même pourquoi pas d’un Ry Cooder pour ce côté bluesy et désertique qui a tant inspiré les débuts du post-rock, entre deux roulements fulgurants du batteur Tim Wyskida (lui même ex Khanate), aussi prompts à balayer le sable et la poussière d’un revers de baguette qu’à disparaître dans le néant.
Et enfin, au diapason de cette épure doom-ambient à la tension dramaturgique étonnamment méditative, les vocalises d’Aaron Turner, prenant la forme tantôt d’un growl nihiliste ou d’un mille-feuille de prédications éthérées mais le plus souvent claires et recouvertes d’une bonne couche d’effets narcotiques, comme sur le bien-nommé Silent Temple, premier extrait d’un Black Curtain qui viendra on l’espère réparer cette petite injustice à compter du 2 octobre prochain :
Un titre à la production plus luxuriante et rêveuse qui surprend même par le romantisme de sa mélodie vocale, rien à voir en somme avec la cover organique quelque peu malsaine du bouzin qui se déclinera en digital, CD et surtout vinyle avec une version alternative du morceau final Beggar’s Grasp.