En ouvrant ce Pigeons sur le diptyque Hibernation/Collector et sa pop baroque toute en contrepieds mélodiques mêlant l’urgence rythmique du post-punk, des lignes de guitare tortueuses à souhait, une basse bondissante et des harmonies vocales en canon influencées tout autant par les Beach Boys que par Animal Collective, les new-yorkais d’Here We Go Magic se risquaient à une comparaison à l’enjeu plus qu’incertain avec leurs homologues anglais de Field Music, auteurs cette année qui plus est d’un double album de haute volée.

Un maximalisme dû à la nouvelle configuration en quintette d’un projet d’abord né des seules compositions à la guitare acoustique et au synthé de son leader Luke Temple, unique auteur du premier opus sorti l’an dernier et dont Pigeons, à défaut de ce groove éthéré aux réminiscences africanisantes relégué ici en toute fin d’album (les Ruby Suns ne sont pas loin) et d’une certaine tendance à la méditation instrumentale sur fond de bruit blanc, retrouvera néanmoins bien vite les spirales stellaires par petites touches de claviers nébuleux (cf. le bien-nommé Moon) après s’être laissé emporter par le vortex psychédélique de Surprise.

Un "virage pop" comme on dit communément, qui nous vaudra notamment un détour par les rêveries analogiques de Jim Noir (Casual) ou celles plus lyriques et planantes des Air de la grande époque (la basse aidant sur Land Of Feeling, sommet de l’album habité d’une étrange mélancolie), voire une certaine forme d’incursion dans le classic rock au milieu des nappes ambient du majestueux F.F.A.P., la guitare country de Bottom Feeder venant rappeler par ailleurs les premières amours folk d’un Luke Temple qui avait su envoyer les guitares en bois dans les étoiles dès le superbe Snowbeast en 2007.

Un véritable labyrinthe baroque plein de zébrures électro minimales et autres réminiscences krautrock dont ces Pigeons -là, toujours voyageurs malgré les apparences et aventureux dans leur production, parviendront finalement à se rapprocher dans l’esprit sans parvenir encore à en retrouver le pouvoir de fascination, faute d’homogénéité peut-être - on se serait notamment bien passé de la digression new wave bien barrée d’Old World United, sonnant comme une rencontre anachronique entre Devo et les Sparks.