Gang Of Four + Midlake + Guillemots + Love Is All + Bat For Lashes - La Cigale (Paris)
le 11/11/2006
Gang Of Four + Midlake + Guillemots + Love Is All + Bat For Lashes - La Cigale (Paris)
Dehors, il fait froid et gris, c’est un samedi férié et banal. Mais à la Cigale, il fait chaud, il y a de la lumière et de la bonne musique en prévision, c’est le festival des Inrockuptibles. Il est facile de deviner où il fallait être ce soir là.
Cette soirée commence en douceur avec les quatre Anglaises de Bat For Lashes qui arrivent en tenues amérindiennes. Ces jeunes femmes nous offrent une musique atmosphérique et mystique qui rappelle les contrées sauvages d’Amérique du Nord. La jolie chanteuse dont la voix bien agréable me rappelle à bien des égards celle de Cat Power, prend du plaisir sur scène avec diverses percussions (maracas, clochettes … ) quand elle ne se met pas au piano pour des mélodies mélancoliques et touchantes. Les autres musiciennes tout aussi charmantes et souriantes l’accompagnent principalement au violon et clavier ou même simplement en tapant des mains. C’est franchement joli et pas désagréable mais voilà sur scène, à ce moment de la journée, la magie chamanique n’a pas eu sur moi l’effet escompté. J’en attendais plus après l’écoute des quelques titres proposés pour la sortie éminente de l’album en France. Les morceaux manquaient souvent de relief sans doute dû à une boite à rythme vraiment monotone à la place d’une batterie qui aurait sûrement fait meilleur effet. C’est seulement sur la fin, que l’éclaircie est venue avec l’utilisation d’un tambour qui a permis aux dernières chansons de prendre de l’amplitude. Malgré cela, je peux dire que la courte prestation a été tout de même convaincante, le public semblant apprécier et s’amusant même à répondre aux hurlements de loups de la chanteuse Natasha Khan surprise et ravie à la fois.
Pour la suite du programme, c’est une toute autre ambiance avec les Suédois de Love Is All dont l’énergie communicative se répand facilement dans la salle. Difficile de ne pas remuer la tête et bouger son corps à l’écoute de ces titres punk-rock à tendance ska. C’est simple, entraînant, pas besoin de réfléchir, faites l’amour comme ils disent… Toute radieuse, la chanteuse sautilllante et remuante fait penser à Karen O des Yeah Yeah Yeahs, et donne tout à s’en déchirer même la voix à certains moments. Le batteur, le bassiste, le guitariste et bien sûr le saxophoniste qui y est pour beaucoup dans la fraîcheur du groupe, prennent autant de plaisir et s’amusent à bouger et sauter n’importe où et faire un peu n’importe quoi sur scène en montant sur les enceintes par exemple, mais tout en restant bien sûr efficaces. Il faut dire que chacun des membres appartient à une autre formation et que Love Is All est une cour de récréation pour eux, un projet qui les a pourtant fait connaître avec ce premier album Nine times that same song , une des belles surprises de cette année. Sans temps mort, les titres dépassant rarement les trois minutes, se sont enchaînés à cent à l’heure, avec en plus des inédits au passage. Ce sont les singles Talk Talk Talk et Busy Doing Nothing qui ont été les plus enthousiasmants de cette prestation franchement dynamique et trop courte.
La salle est chauffée, les Guillemots, la nouvelle sensation pop anglaise peut investir la scène. Mais c’est tout seul que le chanteur, assis sur une vieille chaise en bois avec écharpe, veste vintage et chapeau, se présente devant un piano pour une ballade qui montre l’étendue de sa voix. Il se retrouve ensuite rejoint par le reste du groupe soit une contrebassiste, un guitariste, un clarinettiste, un saxophoniste et un batteur. Le concert peut démarrer réellement avec un Go away accéléré et un Made up Lovesong 43 exalté qui emballent le public. Sur ces morceaux, le groupe démontre qu’il est capable de construire des mélodies entraînantes et entêtantes dont il faut souligner le rôle important de la contrebasse jazzy (que je n’avais pas véritablement remarquée sur album). Mais voilà pour moi, la suite ne tient pas ses promesses. Ca tombe souvent dans l’excès voire l’indigeste à certains moments. C’est vrai que sur scène, ça bouge et c’est un joyeux bordel, qu’ils sont contents et s‘amusent en tapant notamment sur des couvercles de poubelles, avec profusion d’envolées de piano et d’instruments à vent, mais la musique en devient vite fatigante et lassante. Même l’attendu Trains to Brazil qui redonne quand même de l’entrain au public, perd un peu de sa saveur. Finalement, l’impression qui me reste, est mitigée, un peu à l’image de ce premier album Through The Windowpane qui m’a assez déçu malgré les belles possibilités entrevues dans leurs EPs.
C’est enfin au tour des Texans de Midlake de monter sur scène. Les ayant déjà vus juste avant la sortie de leur deuxième album The trials of van occupanther , qui deviendra la sensation que l’on sait aujourd’hui, je sais à quoi m’attendre. Toujours leurs clips projetés sur un écran derrière eux, et cette fois un public qui connaît la plupart des chansons du groupe. J’ai trouvé le groupe plus décontracté et plus à l’aise, sans doute la pression en moins. Se mettant un peu plus en avant, les cinq jeunes hommes restent toujours aussi timides mais qu’importe leur musique ne demande aucune exubérance et cela fait aussi leur charme. Avec leurs claviers vintage, et leurs guitares acoustiques, ils nous servent des mélodies folk-rock simples et aériennes, capables de nous transporter vers de paisibles contrées. Pour ma part, je les ai suivis sans effort, oubliant les films projetés qui m’avaient pourtant la première fois bien accroché. Les premières notes reconnues de Young Bride ravissent déjà le public. La suite sera du même niveau et dans la continuité, mais c’est quand Roscoe pointe son nez que la salle est enchantée. Alors que le morceau touche à sa fin, la musique s’arrête d’un coup, un problème technique avec le batteur. Les membres en plaisantent tout en s’excusant, et dés que tout fut résolu, reprennent le titre depuis le début pour le plaisir de tous, d’ailleurs cette perle-là, ils peuvent la jouer en boucle, on en redemandera toujours. Mais juste après cela, c’est un peu l’incompréhension quand on signale au groupe qu’il n’y a plus de temps pour le dernier morceau prévu. Confus, le groupe sortira mais sera quand même immédiatement rappelé pour un final avec le superbe Head Home qu’il aurait été vraiment dommage de manquer à cause de cinq minutes de retard. Pour résumer en un mot ce concert de Midlake, je dirais magique.
La fin du festival est en fait une belle claque que je n’attendais pas aussi forte. La venue des Anglais de Gang of Four qui se sont reformés, est, il est vrai, un événement en soi. Mais sur scène, vraiment quelle énergie et surtout quelle leçon ils ont donnée à tous ces jeunes groupes post-punks qui s’en inspirent très fortement aujourd’hui, les Radio4, Bloc Party, Franz Ferdinand et consorts … Arrivés en costumes noirs et chemises sombres, ils démarrent tout de suite pied au plancher. Regard de tueurs, ils impressionnent et mitraillent la foule avec leurs guitares par des riffs assassins et des larsens ravageurs, sous la rythmique martiale de la basse et de la batterie combinées. Mélange de punk-rock et de funk, leur musique est sur scène sans concession et vraiment prenante. Dés le début, à ma grande surprise, la fosse est bien déchaînée, toujours dans une bonne ambiance, et j’avoue que ça faisait bien longtemps que je n’avais pas transpiré autant lors d’un concert. Il faut en profiter, c’est seulement leur deuxième passage parisien et le précédent date de 1983 de ce que j’ai ouï dire. Sur scène, les quatre membres de Gang of Four, la cinquantaine passée, sont tout aussi survoltés et en sueur, s’autorisant quelques légères pauses de temps en temps entre les morceaux pour souffler tout de même. Engagés musicalement, ils le sont aussi sur scène. Le message est évident quand pendant bien cinq minutes sur un morceau, le chanteur s’amuse à fracasser en rythme et en réponse aux riffs de guitare, un four micro-onde avec une sorte de massette métallique. Un pur moment de plaisir, que l’on n’oubliera pas de sitôt. En tout cas, le premier album Entertainment est passé en revue et n’a pas pris une ride depuis sa sortie en 1979, les titres sont toujours aussi tranchants et rageurs tout en étant "dansants" : j’en oublie, mais Return the gift, Natural’s Not It et surtout Damaged Goods ou At Home He’s a Tourist ont fait sensation. Après un rappel, les applaudissements étaient largement mérités pour ce groupe qui clôturait le festival de la plus belle des manières …
Au final, il n’y avait vraiment rien à jeter dans la programmation de cette soirée de festival, où il régnait une bonne ambiance. Même si j’ai critiqué quelque peu certains groupes, je ne regrette en aucun cas de les avoir vus. En fait, j’en attendais peut-être plus de leur part, ce qui pourra toujours s’améliorer lors de prochains concerts. Mais il est vrai aussi que les conditions d’un festival bien organisé ne sont pas toujours optimales avec entre autres des contraintes de timing … Rendez-vous l’année prochaine pour l’édition 2007 …
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